L'Autre Versant du monde

Argentine - Chili
« Chien, homme, terre noire, tout se lie et tout dit que le vrai domicile de Jacques Borgetto sûrement n’est pas une maison, mais une photographie, une ligne de vie à partager. » – Laurent Boudier

L’AUTRE VERSANT DU MONDE

« Le vrai domicile de l’homme n’est pas une maison mais la route, et la vie elle-même est un voyage à faire à pied. » – Bruce Chatwin

La route, donc notre chemin, peut être inscrite de mots. Mais, on le sait, encore, de visages fixés à la fraction de la seconde, de paysages façonnés comme des ombres tenaces, de lignes pures qui recréent la sensation. Où trois petites silhouettes d’enfants mennonites, un chien blanc presque fantomatique, une fête de village avec ses danseurs aux corps arqués comme dans une peinture de Botero, ou simplement, le vide et l’espace d’un parking crépusculaire, s’inscrivent dans notre regard. Les trajets photographiques de Jacques Borgetto au Chili ou en Argentine – des salines d’Atacama au geyser de del Tatio, ou de la pampa Santa Rosa à la péninsule de Valdés – ne sont presque plus des lieux. Ce sont plutôt des motifs, ceux du déplacement. Loin de tout exotisme, c’est son auteur même qui déplace sa propre personne, sa propre solitude et sa propre perception. II écrit des récits, des chapitres : le voyage recommence par chaque fois, en chaque cliché, l’essence photographique exprimée par un Lewis Hine, un Walker Evans ou un Robert Franck. La route est alors une pudeur et fait aveu d’une grande douceur vers la communauté des ombres et des lumières. Chien, homme, terre noire, tout se lie et tout dit que le vrai domicile de Jacques Borgetto sûrement n’est pas une maison, mais une photographie, une ligne de vie à partager.

Laurent Boudier